CABINET D'AVOCAT ARNAUD SOTON
AVOCATS FISCALISTES
CABINET D'AVOCAT ARNAUD SOTON
AVOCATS FISCALISTES

DÉCLARATION DES COMPTES À L’ÉTRANGER (rappel du 13/04/2023)


L'obligation de déclaration des comptes à l'étranger s’étend aux comptes que le contribuable a utilisés, quel qu’en soit le titulaire. En effet, dans un arrêt du 8 mars 2023, (CE, 8e et 3e ch., 8 mars 2023, n° 463267), le Conseil d’Etat a jugé que l'obligation de déclaration des comptes à l'étranger s’étend aux comptes que le contribuable a utilisés, quel qu’en soit le titulaire, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale. Cette notion de « y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale » est une notion nouvelle.

Aux termes de l’article 1649 A, al.2 du code général des impôts (CGI), les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l'étranger.

Les personnes physiques sont considérées comme étant fiscalement domiciliées en France, au regard de l'impôt sur le revenu lorsqu'elles se trouvent dans l'une des situations énoncées par l'article 4 B du CGI, c’est-à-dire les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Les personnes morales concernées par l'obligation déclarative sont considérées comme établies en France, dès lors qu'elles y exercent leur activité.

Il existe un fichier des comptes bancaires détenus hors de France par des personnes physiques ou morales, dénommé Evafisc.

Chaque compte doit faire l’objet d’une déclaration distincte établie sur un imprimé n° 3916, la possibilité d’une déclaration sur papier libre étant supprimée. En effet, dans la dernière mise à jour de ses commentaires, l'administration n'évoque plus la possibilité d'une souscription sur papier libre. La déclaration est donc désormais uniquement effectuée sur l'imprimé 3916-3916 bis (intitulé « Déclaration par un résident d'un compte ouvert, détenu, utilisé ou clos à l'étranger ou d'un contrat de capitalisation ou placement de même nature souscrit hors de France ») (BOI-CF-CPF-30-20 n° 190, 26-5-2021).

Ne sont pas, en revanche, soumises à l'obligation de déclaration, les personnes physiques non astreintes à l'obligation de souscrire une déclaration de revenus 2042 ; les associations qui, n'ayant pas de revenus imposables, ne sont pas tenues à une obligation de dépôt d'une déclaration de résultats ; les sociétés à forme non commerciale qui sont dispensées de souscrire une déclaration de résultats. Tel est le cas, par exemple, des sociétés civiles immobilières non transparentes qui affectent gratuitement à la disposition de leurs membres des logements dont elles sont propriétaires.

Aux termes de l’article 344 A de l’annexe III au code général des impôts, les comptes à déclarer en application du deuxième alinéa de l’article 1649 A du code général des impôts sont ceux ouverts auprès de toute personne de droit privé ou public qui reçoit habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces. Les personnes physiques joignent la déclaration de compte à la déclaration annuelle de leurs revenus.

Les textes précisent que la déclaration de compte porte sur le ou les comptes ouverts, utilisés ou clos, au cours de l’année ou de l’exercice par le déclarant, l’un des membres de son foyer fiscal ou une personne rattachée à ce foyer.

Un compte est réputé avoir été utilisé par l’une des personnes visées dès lors que celle-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration, qu’elle soit titulaire du compte ou qu’elle ait agi par procuration, soit pour elle-même, soit au profit d’une personne ayant la qualité de résident.

Avant le 1er janvier 2019, un compte bancaire à l’étranger n’enregistrant que l’inscription des intérêts des sommes en dépôt et le paiement de frais de gestion n’était pas au nombre des comptes devant être déclarés.

Dans l’arrêt du Conseil d’Etat du 04/03/2019 (CE 04/03/2019 n° 410492), des contribuables ont fait l’objet d’un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2008 à 2010, à l’issue duquel l’administration fiscale leur a infligé l’amende prévue par les dispositions du IV de l’article 1736 du code général des impôts pour défaut de déclaration de deux comptes ouverts au Luxembourg auprès de la banque BGL BNP Paribas.

Le tribunal administratif de Nice dans un jugement du 24 avril 2015 a déchargé les contribuables de l’amende infligée au titre de l’année 2009 pour l’un des deux comptes détenus à l’étranger au motif que le compte bancaire détenu par les contribuables au Luxembourg n’avait enregistré, au cours de l’année 2009, que des opérations de crédit relatives au versement des intérêts que ce compte avait produits et des opérations de débit portant sur des frais bancaires afférents à sa tenue, et que ces opérations, qui ne constituaient pas des mouvements de fonds sur le compte en cause, ne permettaient pas de considérer que ce compte avait été utilisé pendant l’année 2009.

L’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille en date du 11 avril 2017 ayant rejeté son appel dirigé contre le jugement, l’administration fiscale s’est pourvue en cassation.

Le pourvoi de l’administration est rejeté par le Conseil d’État qui considère qu’il résulte des travaux préparatoires de la loi de finances pour 1990 dont sont issues les dispositions précédemment citées de l’article 1649 A du code général des impôts que le législateur, en mettant en place une obligation de déclarer les comptes bancaires utilisés à l’étranger, a entendu instaurer une procédure de déclaration des mouvements de fonds sur de tels comptes afin de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, s’agissant de contribuables qui ne sont pas astreints à la tenue d’une comptabilité et d’opérations bancaires pour lesquelles l’administration ne peut se faire communiquer les relevés en exerçant son droit de communication.

Le Conseil d’État estime qu’eu égard à l’objet des dispositions en cause, un compte bancaire ne peut être regardé comme ayant été utilisé par un contribuable pour une année donnée que si ce dernier a, au cours de cette année, effectué au moins une opération de crédit ou de débit sur le compte. Ne constituent donc pas de telles opérations, d’une part, des opérations de crédit qui se bornent à inscrire sur le compte les intérêts produits par les sommes déjà déposées au titre des années précédentes, et, d’autre part, des opérations de débit correspondant au paiement des frais de gestion pour la tenue du compte.

Cette solution est rappelée par la Cour de cassation dans son arrêt du 14/04/2021 (Cass. com. 14/04/2021 n° 19-23.230). Dans cette affaire, portant sur la rédaction antérieure de l’article 1649 A du CGI, le contribuable était titulaire de comptes bancaires ouverts, à son nom ou au nom d'une société de droit panaméen, dans les livres d'une banque établie en Suisse.

Ainsi, avant l’intervention de la loi de 2018 relative à la lutte contre la fraude, un compte bancaire à l’étranger n’enregistrant que l’inscription des intérêts des sommes en dépôt et le paiement de frais de gestion de ce compte n’était pas au nombre des comptes devant être déclarés.

A noter que depuis le 1er janvier 2019, doivent être déclarés les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger ; la nouvelle rédaction de l’article 1649 A, issue de la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 - art. 7 (V), étant la suite : "les personnes physiques, les associations, les sociétés n’ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger".

Il résulte donc de cette nouvelle rédaction que les comptes n’enregistrant que l’inscription des intérêts des sommes en dépôt et le paiement de frais de gestion sont désormais au nombre des comptes devant être déclarés.

Selon le BOI-CF-CPF-30-20 n° 85, les comptes financiers détenus à l’étranger, adossés à un compte ouvert en France et destinés à réaliser des transactions en ligne (achats ou ventes de biens), n’ont pas à être déclarés, sauf ceux sur lesquels des encaissements liés à des ventes excèdent 10.000 € par an. L'obligation de déclaration prévue par l'article 1649 A du CGI ne s'applique donc pas aux comptes détenus à l'étranger dans des établissements financiers lorsque sont satisfaites trois conditions cumulatives : le compte a pour objet de réaliser en ligne des paiements d'achats ou des encaissements afférents à des ventes de biens ; l'ouverture du compte suppose la détention d'un autre compte ouvert en France et auquel il est adossé ; la somme des encaissements annuels crédités sur ce compte et afférents à des ventes réalisées par son titulaire n'excède pas 10 000 €. Ce seuil est apprécié, le cas échéant, en faisant la somme de tous les encaissements effectués sur l'ensemble des comptes détenus par le même titulaire et ayant pour objet de réaliser en ligne des paiements d'achats ou des encaissements afférents à des ventes de biens.

Les comptes détenus auprès de banques en ligne installées à l'étranger doivent être déclarés (Rép. Petit : AN 6-4-2021 n° 30729).

Les infractions aux dispositions de l’article 1649 A sont passibles d’une amende de 1 500 euros par compte non déclaré. Ce montant est porté à 10 000 euros par compte non déclaré lorsque l’obligation déclarative concerne un État ou un territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires. C’est le cas par exemple d’un compte qui serait détenu aux Iles Vierges Britanniques.

L'obligation de déclaration ne porte pas uniquement sur les comptes dont le contribuable est titulaire, mais porte aussi sur les comptes qu'il a utilisés. Ainsi, l'amende pour défaut de déclaration est applicable à une contribuable qui a omis de déclarer un compte qu'elle a utilisé à l'étranger même si ce dernier est ouvert au nom de son concubin ainsi qu'un autre compte, ouvert à son propre nom également à l'étranger, même s'il ne s'agit que d'un compte de transit d'un avoir reçu d'un héritage. CE 30/12/2009 n° 299131).

Il est à noter également qu’aux termes des dispositions de l’article L.188 du LPF, alinéa 2, les amendes fiscales sont prescrites à l’expiration de la 4ème année suivant celle au cours de laquelle les infractions ont été commises.

Lorsque les obligations déclaratives ne sont pas respectées, l’administration envoie au contribuable une lettre 751 ayant pour objet « Amendes pour non déclaration de comptes bancaires détenus à l’étranger ».

La lettre rappelle les dispositions des articles 1736-IV-2, 1649 A et 1649 A bis du CGI, celles des articles 344 A et 344 B de l’annexe III au CGI, celles de de l’article L.188 alinéa 2du LPF, et indique que le contribuable n’a pas rempli ses obligations déclaratives alors qu’il apparaît qu’il est bénéficiaire de comptes bancaires détenus étrangers.

La lettre indique le montant total de l’amende, en fonction du nombre de comptes en question, et précise au contribuable qu’à compter de la réception du document, il dispose d’un délai de trente jours pour présenter ses observations, conformément aux dispositions de l’article L80 D du livre des procédures fiscales, et que passé ce délai, et sauf acceptation des observations éventuelles, les majorations seront mises en recouvrement.

Il faut noter que l’article L 169, 5e al., du LPF fixe à dix ans, au lieu de trois ans dans le droit commun, le délai de reprise en cas de non-respect des obligations déclaratives prévues à l’article 1649 A du CGI. Toutefois, cette extension de délai ne s’applique pas lorsque le contribuable apporte la preuve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l’étranger est inférieur à 50.000 € au 31 décembre de l’année au titre de laquelle la déclaration devait être faite.

Il a été jugé que la déclaration d’un compte ouvert à l’étranger exigée par l’article 1649 A du CGI ne peut être souscrite que par le titulaire de ce compte ou une personne ayant procuration. C’est ainsi que lorsque le titulaire du compte est marié, et alors même que la déclaration spécifique doit être jointe à la déclaration d’ensemble des revenus, l’amende pour défaut de déclaration prévue par l’article 1736, IV du CGI (ex-article 1768 bis) ne peut, sauf procuration, être infligée qu’à l’époux titulaire du compte, par voie de rôle établi à son seul nom. 

De même, l’obligation déclarative ne concernant que les titulaires de ces comptes et les bénéficiaires d'une procuration sur ces comptes, lorsqu'une entité détient des comptes ouverts, utilisés ou clos hors de France, ses associés ne sont pas tenus de déclarer ces comptes sauf s'ils sont cotitulaires ou bénéficient d'une procuration sur ces comptes. C’est ainsi qu’une association détenant, par exemple, une participation dans une société d'investissement à capital variable (Sicav) n'est pas soumise à l'obligation déclarative portant sur les comptes ouverts, utilisés ou clos par la Sicav. (Rép. Poisson : AN 29 -12- 2015 p. 10789 n° 82934).

En revanche, dans un arrêt du 8 mars 2023, (CE, 8e et 3e ch., 8 mars 2023, n° 463267), le Conseil d’Etat a jugé que l'obligation de déclaration des comptes à l'étranger s’étend aux comptes que le contribuable a utilisés, quel qu’en soit le titulaire, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale. Cette notion de « y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale » est une notion nouvelle.

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat reteint qu’entre dans le champ de l’obligation déclarative, tout compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l'étranger par une personne physique, une association ou une société n'ayant pas la forme commerciale, domiciliée ou établie en France, quel que soit le titulaire de ce compte, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale. Tel est le cas d’un compte bancaire ouvert en Lettonie au nom d’une société chypriote dont le requérant était actionnaire à 50 %, sur lequel il détenait une procuration lui donnant tous pouvoirs, et depuis lequel les sommes correspondant aux factures qui y avaient été réglées avaient ensuite été transférées vers des comptes bancaires personnels de l’intéressé et des membres de sa famille, à l'étranger.

En effet, au cas particulier, une société française qui exerce l'activité principale d'achat-revente d'étiquettes pour vêtements, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos au cours des années 2011 à 2013.  A l'issue du contrôle, l'administration fiscale a constaté que son dirigeant avait créé avec son père, une société de droit chypriote à laquelle il avait confié une mission d'agent commercial intermédiaire entre la société française et ses fournisseurs, la société chypriote refacturant les achats à la société française avec une majoration moyenne d'environ 30 % sur la période allant de 2011 à 2013, pour un montant total de près de deux millions d'euros. Les factures adressées à la société française avaient été réglées par virement au crédit d'un compte bancaire ouvert en Lettonie au nom de la société chypriote, sur lequel le dirigeant en question détenait une procuration lui donnant tous pouvoirs, et depuis lequel les sommes en cause avaient ensuite été transférées vers ses comptes bancaires personnels et des membres de sa famille à l'étranger, directement ou par l'intermédiaire d'une société basée au Belize.

L'administration a donc considéré, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 A du code général des impôts, que le solde créditeur du compte bancaire letton de la société chypriote provenant de la facturation de sa prestation d'intermédiaire devait être regardé comme un revenu taxable entre les mains du contribuable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Le contribuable a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti. Le tribunal, ainsi que la CAA de Paris, en appel, ont rejeté la demande. Le contribuable s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat, qui a, à son tour, rejeté le pourvoi.

Le Conseil d’Etat a d’abord rappelé que les dispositions, qui instaurent l'obligation, pour tout contribuable domicilié en France, de déclarer à l'administration les références de tout compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l'étranger, prévoient qu'à défaut d'une telle déclaration, les fonds ayant transité par ce compte constituent des revenus imposables, sauf pour le contribuable à apporter la preuve que les sommes en question n'entraient pas dans le champ d'application de l'impôt ou en étaient exonérées, ou qu'elles constituaient des revenus qui avaient déjà été soumis à l'impôt. Le Conseil d’Etat retient ensuite, qu’entre dans le champ de l'obligation déclarative posée par ces dispositions tout compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l'étranger par une personne physique, une association ou une société n'ayant pas la forme commerciale, domiciliée ou établie en France, quel que soit le titulaire de ce compte, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale.

L'obligation de déclaration des comptes à l'étranger s’étend donc aux comptes que le contribuable a utilisés, quel qu’en soit le titulaire.

Les contribuables n’ayant pas déclaré les comptes qu’ils détiennent à l’étranger peuvent toujours régulariser spontanément leur situation auprès des services fiscaux en souscrivant une déclaration rectificative, auquel cas la majoration pour manquement délibéré et l’amende pour défaut de déclaration sont réduites par voie de transaction.

Arnaud Soton

Avocat fiscaliste

Professeur de droit fiscal


Lire les commentaires (0)

Articles similaires


Soyez le premier à réagir

Ne sera pas publié

Envoyé !

Derniers articles

Précision sur l'exclusion du droit à déduction de la TVA s'agissant des véhicules à usage mixte.

Le recours hiérarchique après la vérification n’ouvre pas un nouveau débat oral et contradictoire.

La transaction en matière fiscale.

Catégories