Est régulière la notification d’une proposition de rectification par un e-mail contenant un lien vers l’application « Escale » de l’administration permettant au contribuable de télécharger la proposition.
En principe, la proposition de rectification est adressée au contribuable lui-même. Mais elle peut aussi être adressée à une personne désignée par celui-ci. Certains vérificateurs adressent une copie de la proposition de rectification à l’avocat du contribuable si ce dernier en a un. Lorsque le contribuable destinataire est une entreprise, la proposition de rectification comporte la forme juridique et la dénomination sociale et l’adresse du siège social. Elle est notifiée à l’entreprise par le biais de son représentant légal. En cas de redressement et de liquidation judiciaires, la notification est adressée soit à l'administrateur judiciaire, en cas de mission d'administration, soit au contribuable dans le cas où l'administrateur est chargé d'une mission de surveillance. En cas de liquidation judiciaire, la notification est adressée au liquidateur. Lorsque le destinataire de la notification est une personne physique, il est indiqué ses nom, prénoms et adresse. Il a été jugé que l'erreur éventuelle qui serait commise sur la proposition de rectification quant au prénom du contribuable n'entache pas d'irrégularité la procédure dès lors que la proposition, qui mentionnait sans ambiguïté possible le nom, la profession et l'adresse de l'intéressé, est parvenue à son destinataire (CAA Paris 28-1-1992 n° 276).
L'adresse à retenir est, en principe, celle du lieu où le contribuable souscrit ses déclarations. Mais il a été jugé qu’une proposition de rectification adressée à un contribuable au lieu d'exercice de sa profession (et non à son domicile) est régulière. De même est régulière une proposition de rectification envoyée à une adresse autre que le siège social, si cette adresse a été indiquée par la société elle-même dans ses correspondances précédentes (CE 25-7-1980 n° 16503). En cas de changement d'adresse, le contribuable doit avertir l'administration et prendre toutes les dispositions nécessaires pour faire suivre son courrier.
En cas d'absence temporaire, le juge considère qu'il appartient au contribuable de prendre toutes dispositions utiles pour faire suivre son courrier et ce, quelle que soit la cause de l'absence (voyage, vacances, déplacement). La notification retournée à l'expéditeur est donc régulière car réputée avoir été normalement effectuée.
Il peut arriver que les rectifications soient effectuées à l'encontre d'un contribuable majeur en tutelle. Dans ce cas la notification est faite à l'intéressé représenté par son tuteur et à l'adresse de ce dernier. Dans le cas d'un contribuable majeur en curatelle, la notification est faite directement au contribuable, mais une copie est adressée pour information au curateur. Lorsque le contribuable est décédé, la proposition de rectification peut être adressée à l'un quelconque des ayants droit. Lorsque le contribuable est détenu en prison, l’administration recherche si la notification peut être effectuée auprès d'un mandataire ou du conjoint dudit contribuable, mais la remise en main propre du pli peut parfois être effectuée directement auprès du détenu en prison.
En principe, la proposition de rectification est notifiée par voie postale en recommandé avec avis de réception. Mais aucune disposition n’impose à l'administration de recourir exclusivement à l'envoi d'une proposition de rectification par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle peut donc faire recours à d’autres voies de notification. La proposition de rectification peut ainsi être remise directement au contribuable en main propre. Il a même été jugé qu’une proposition de rectification peut être envoyée au contribuable par courriel (TA Melun 17-5-2018 N° 1604700).
La cour administrative d’appel de Paris a jugé régulière la notification de la proposition de rectification par le biais d’un lien, envoyé par courriel à l’adresse électronique du contribuable, vers l’application d’échanges sécurisés de fichiers de l’administration fiscale dénommée « Escale ».
Aucune disposition ne fait obstacle à l'envoi d'une proposition de rectification unique faisant suite à une vérification de comptabilité et à un examen de situation fiscale personnelle, dès lors que les conséquences de l'une et de l'autre de ces vérifications y sont parfaitement distinguées.
En ce qui concerne le délai d’envoi, aucune disposition expresse ne fixe le délai d'envoi de la notification après la fin du contrôle. La notification peut donc, en principe, être faite jusqu'à l'expiration du délai de prescription.
La Cour de cassation a jugé qu’en cas de notification par voie postale d'un document au contribuable, l'administration fiscale doit apporter la preuve que la réglementation postale a été respectée, notamment dans le cas où le pli recommandé est renvoyé à l'administration.
En effet, pour la Cour de cassation, l'administration fiscale doit justifier que le destinataire a été avisé, par un avis de passage, qu'un pli était à sa disposition au bureau de poste dont il relève et ce, pendant un délai de 15 jours, et il faut respecter ce délai de quinze jours. L’administration fiscale doit donc établir que le pli ne lui a été renvoyé qu'à l'expiration de ce délai de quinze jours.
En l’espèce, l’administration fiscale a adressé à une contribuable, une proposition de rectification portant rappel d’ISF et de contribution exceptionnelle sur la fortune au titre de l'année 2012, au motif que la valeur vénale déclarée des biens immobiliers devait être rehaussée.
La proposition de rectification est datée du 21 avril 2015. Un courrier avait été retourné le 23 avril 2015 à l'administration fiscale, avec la mention "pli non réclamé".
La contribuable a déposé une réclamation qui a été rejetée par l’administration fiscale. Elle a alors assigné l'administration fiscale aux fins d'obtenir la nullité de la procédure et la décharge de l'imposition correspondante s'agissant de certains locaux, ainsi que la réduction de la base d'imposition déclarée s'agissant d’autres locaux, pour défaut de preuve d'une notification régulière de la proposition de rectification du 21 avril 2015. Elle soutient qu'il appartient à l'administration d'établir la régularité de la notification de la proposition de rectification, et qu'en considérant que la proposition de rectification datée du 21 avril 2015 avait été régulièrement notifiée, après avoir relevé qu'un courrier avait été retourné le 23 avril 2015 à l'administration fiscale avec la mention "pli non réclamé", soit dans un délai de deux jours incompatible avec l'envoi, la présentation et la mise en instance du pli par les services postaux, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a méconnu les droits et garanties du contribuable.
La Cour de cassation lui donne gain de cause. En effet, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes de l’article R. 1-1-6 du code des postes et des communications électroniques, lorsque la distribution d'un envoi postal recommandé relevant du service universel est impossible, le destinataire est avisé que l'objet est conservé en instance pendant quinze jours calendaires, et qu’à l'expiration de ce délai, l'envoi postal est renvoyé à l'expéditeur lorsque celui-ci est identifiable.
Pour la Cour de cassation, en cas de contestation portant sur la notification de la proposition de rectification, il incombe à l'administration fiscale, qui a la charge de la preuve de la régularité de cette notification, de justifier, en cas de retour à l'expéditeur du pli recommandé contenant la proposition de rectification, d'une part, que le destinataire a été avisé, par la délivrance d'un avis de passage, de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste dont il relevait pendant un délai de quinze jours à compter de la date de passage, d'autre part, que le pli n'a été retourné à l'expéditeur qu'à l'expiration de ce délai.
Or, en l’espèce, la proposition de rectification est datée du 21 avril 2015, et une lettre a été retournée le 23 avril 2015 à l'administration fiscale avec la mention « pli non réclamé ». Le courrier contenant la proposition de rectification, présentée en l’absence du contribuable, n’avait donc pas passé quinze jours dans les locaux de la poste, avant d’être retourné à l’administration fiscale. La cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les dispositions précitées, et son arrêt encourt la cassation. L’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris a donc été cassé sur ce point (Cass. com., 10 mai 2024, n° 22-14.130).
Arnaud Soton
Avocat Fiscaliste
Professeur de droit fiscal