Plus-value sur cession de droits sociaux par un résident étranger.
Conformément aux dispositions de article 200 A, 1 A-2° du CGI, les plus-values de cession de valeurs mobilières et droits sociaux réalisées par les particuliers depuis le 1er janvier 2018 sont soumises de plein droit à l'impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8 %. Le taux forfaitaire de 12,8 % est applicable à l'ensemble des plus-values des cessions de valeurs mobilières et de droits sociaux du foyer fiscal, réalisées dans le cadre de la gestion du patrimoine privé du foyer. Les contribuables peuvent toutefois opter pour l’imposition de l’ensemble de leurs revenus de capitaux mobiliers et plus-values de cession de valeurs mobilières au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Les contribuables, résidents français, ont donc le choix, qui n'est pas offert aux personnes domiciliées hors de France, de renoncer au prélèvement libératoire de 12,8 % sur les gains réalisés lors de la cession de parts sociales, et de soumettre les gains au barème progressif de l'impôt sur le revenu.
Les contribuables résidant à l’étranger n’ont pas la possibilité de renoncer au prélèvement libératoire de 12,8 % et de soumettre les gains au barème progressif de l'impôt sur le revenu. En effet, l'article 244 bis B du code général des impôts soumet à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu les gains résultant de la cession de droits sociaux par des personnes physiques qui ne sont pas domiciliées en France au sens de l'article 4 B du même code, lorsque les droits détenus par le cédant et son conjoint ainsi que leurs ascendants et leurs descendants ont dépassé 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession. Le deuxième alinéa de cet article dispose que ce prélèvement est fixé au taux de 12,8 % lorsqu'il est dû par une personne physique.
Au cas particulier, un contribuable de nationalité française et résidant en Norvège, soumis au prélèvement libératoire de 12,8 % sur les gains réalisés lors de la cession de parts sociales d'une société installée en France, a demandé, parallèlement à la décharge de cette imposition, l'abrogation des commentaires administratifs BOI-RPPM-PVBMI-20-20-10, publiés le 25 mai 2023, qui reprennent les dispositions de l'article 244 bis B, pour l'entrave qu'ils recèlent, comme le texte lui-même, à la libre circulation des capitaux.
Le Conseil d’Etat lui donne raison en estimant qu’un contribuable ne résidant pas en France peut être amené à supporter, pour la même opération, une charge fiscale plus importante qu'un résident français et que la liberté de circulation des capitaux est ainsi directement atteinte. Or, le 1 de l'article 63 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose que toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites. Et il n'existe objectivement aucune différence de situation susceptible de justifier ce traitement fiscal différent qu'aurait autorisé l'article 65 du TFUE, l’administration fiscale n'invoquant par ailleurs, aucune raison impérieuse d'intérêt général qui aurait pu, elle aussi, justifier l'imposition spécifique des résidents étrangers.
La décision que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a opposée à la demande du contribuable a donc été annulée par le Conseil d’Etat, en tant qu'elle refuse d'abroger le premier alinéa du paragraphe 10 des commentaires publiés le 25 mai 2023 sous la référence BOI-RPPM-PVBMI-20-20-10, de même que la totalité de la " Remarque 2 " composant le dernier alinéa de ce paragraphe.
Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 31/05/2024, 489370, Inédit au recueil Lebon.
Arnaud SOTON
Avocat fiscaliste
Professeur de droit fiscal