CABINET D'AVOCAT ARNAUD SOTON
AVOCATS FISCALISTES
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La réclamation préalable (partie 4)


8. La forme et le contenu de la réclamation préalable

Selon les dispositions de l’article R*197-3 du LPF, toute réclamation doit à peine d'irrecevabilité, mentionner l'imposition contestée ; contenir l'exposé sommaire des moyens et les conclusions de la partie, porter la signature manuscrite de son auteur; être accompagnée soit de l'avis d'imposition, d'une copie de cet avis ou d'un extrait du rôle, soit de l'avis de mise en recouvrement ou d'une copie de cet avis, soit, dans le cas où l'impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement, d'une pièce justifiant le montant de la retenue ou du versement. Ils résultent de ces dispositions que la réclamation doit être écrite. Lorsque l'avis d'imposition ou l'avis de mise en recouvrement n’est pas produit et que ce défaut de production a motivé le rejet de la réclamation, ce vice de forme peut être régularisé devant le tribunal administratif jusqu'à la clôture de l'instruction (CE 9e-7e s.-s. 20-2-1989 n° 65899).

Une réclamation verbale n’est donc pas recevable. C’est ainsi que la démarche du contribuable qui a exprimé une contestation lors d'une entrevue avec un inspecteur des impôts ne constitue pas une réclamation, dès lors qu'elle ne s'est matérialisée par aucun acte écrit (CAA Bordeaux 19-11-1993 n° 92-425 et 92-426).

On ne peut pas contester, en principe, non plus, une imposition qui n'a pas encore été mise en recouvrement. En pratique, il convient de préciser ses conclusions dans la réclamation. La réclamation peut tendre à obtenir, soit une décharge totale de l’imposition litigieuse, soit une réduction de cette imposition, soit  encore une restitution lorsque l’impôt a déjà été payé. C’est ainsi par exemple qu’une lettre ne comportant aucune conclusion en décharge d'une imposition ne constitue pas une réclamation (CE 28-9-1988 n° 50514, 8e et 7e s.-s.). Il faut être précis dans la réclamation sur les impôts contestés d'autant que la réclamation fixe définitivement l'étendue du litige qui pourra être ultérieurement porté devant le juge au cas où le contribuable n'obtiendrait pas satisfaction devant l'administration fiscale. Quoiqu’il soit prudent de contester aussi bien les droits que les éventuelles pénalités, il n’est pas obligatoire de contester lesdites pénalités car la contestation des droits en principal dans la réclamation vaut aussi contestation des pénalités calculées en proportion de ces droits.

Il faut accompagner la réclamation de toutes les pièces qui justifient les arguments développés pour contester les impositions litigieuses. Au cas où les pièces justificatives ne sont pas encore rassemblées, la réclamation peut toutefois être envoyée et on pourra envoyer au service les pièces dans un second temps. En cas de réclamation consécutive à un contrôle fiscal, il est utile d’accompagner la réclamation de la proposition de rectification également, et le cas échéant, des observations formulées par le contribuable à la suite de la proposition de rectification ainsi que la réponse du service à ces observations. L’objet de la demande peut être soit « réclamation préalable », soit « recours administratif contentieux », mais il importe simplement que l’administration comprenne ce que lui demande le contribuable.

Quand on est avocat déposant pour le compte de son client, une réclamation suite à un contrôle fiscal, on peut, par exemple, après avoir indiqué l’objet de la demande, les adresses des destinataires et la date, indiquer : « J’interviens en qualité de conseil de la société X (ou de M ou MME Y), à la suite la  proposition de rectification du (date de la proposition de rectification), liée à la vérification de comptabilité (ou à l’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle) concernant la période du (date de début de la période vérifiée) au (date de fin de la période vérifiée), et la réponse du (date de la réponse aux observations éventuelles), aux observations formulées par le contribuable (date à laquelle les observations ont été envoyées), maintenant en totalité (ou partiellement) les rectifications qui ont été proposées. Mon client conteste les impositions pour les raisons exposées ci-après ».

Puis, il faut reprendre un par un, les différents points de rectification qu’on souhaite contester. A chaque fois, il faut d’abord rappeler les règles de droit applicables, la jurisprudence allant dans le sens de la contestation avant de confronter les règles au cas particulier et indiquer expressément que la rectification en question est contestée. Si des observations avaient été formulées suite à la proposition de rectification et que le service a apporté une réponse, il faut analyser les éléments de réponse apportés et les contrer utilement. Il est donc recommandé  de bien citer dans sa demande les dispositions législatives ou réglementaires sur lesquelles elle se fonde, en précisant, s'il y a lieu, l'interprétation qu’on entend leur donner et se référer à des décisions de jurisprudence appropriées.

La réclamation doit être signée par le contribuable ou la personne mandatée à cet effet. Si la réclamation n’est pas signée, l'administration doit inviter le contribuable, par lettre recommandée avec accusé de réception, à signer sa réclamation dans un délai de trente jours. Passé ce délai, une réclamation non signée ou signée irrégulièrement est irrecevable (BOI-CTX-PREA-10-50 n° 130, 12-9-2012).

La réclamation doit en principe être adressée au service des impôts dont dépend le lieu de l'imposition ou au service qui est à l’origine des impositions contestées. Dans le cadre d’une réclamation déposée à la suite des rectifications issues d’un contrôle fiscal, il faut adresser la réclamation au service vérificateur. Le contribuable ne court toutefois aucun risque pour avoir envoyé sa réclamation au mauvais service, car il appartient au service des finances publiques saisi d'une réclamation qui ne lui est pas destinée de la transmettre au service compétent et d'aviser le réclamant de cette transmission (BOI-CTX-PREA-10-10, n° 120). Une réclamation non signée n'est pas recevable même si elle a été envoyée par lettre recommandée (CE 7e-8e s.-s. 4-6-1975 n° 98031).

La réclamation peut être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception ou être envoyée par courriel. Il ne résulte pas des articles R 190-1, R 197-3 et R 197-4 du LPF qu'une réclamation ne peut pas régulièrement être adressée par courrier électronique à l'administration fiscale. En pratique, les réclamations sont envoyées par l’avocat à l’administration par courriel. En cas d’envoi par courriel, et dans le cas d’une réclamation déposée suite à un contrôle fiscal, il est conseillé d’adresser la réclamation, non seulement au vérificateur ayant procédé à la vérification de comptabilité ou à l’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, mais aussi à son service, comme par exemple la brigade de vérification à laquelle il appartient. Lorsque les pièces constituent des fichiers trop lourds à envoyer directement par courriel, il faut demander au vérificateur de créer un jeton ESCALE, permettant l’envoi de fichiers plus volumineux. En pratique, il est important lorsque la réclamation est envoyée au service vérificateur, de mettre en copie le comptable public, c’est-à-dire le pôle de recouvrement, surtout si un sursis de paiement est demandé. Bien-sûr que lorsque le service vérificateur reçoit la réclamation, il en informe le pôle de recouvrement, mais il peut arriver qu’un comptable public, pressé de recouvrer l’impôt, commence à pratiquer des saisie administratives à tiers détenteur, ne sachant pas qu’une réclamation avec demande de sursis de paiement est déposée. Il peut même être utile de téléphoner rapidement au pôle de recouvrement pour l’informer qu’une réclamation est déposée avec demande de sursis de paiement.

Dans un arrêt du 13/11/2024 (CE 13 novembre 2024, n° 473814), le Conseil d’Etat a jugé que l’envoi d'une liasse rectificative après l'expiration du délai de déclaration et visant à réparer une erreur commise par le contribuable, même sans l'assortir d'aucune explication,  peut constituer une réclamation préalable.

Au cas particulier, une société a déclaré un bénéfice au titre de son exercice clos en 2013 et acquitté l’IS correspondant en 2014. En mars 2016, soit avant le 31/12/2016, date d’expiration du délai de réclamation, son administrateur judiciaire a adressé aux impôts une liasse fiscale rectificative au titre de l'exercice 2013 faisant apparaître un déficit.

Sans réponse de l’administration fiscale, l’administrateur a adressé un second courrier à l’administration fiscale le 20 décembre 2018, sollicitant la restitution du trop-versé.

La réclamation ayant été rejetée, la société a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la restitution de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013. Mais le tribunal administratif a rejeté sa demande et l’appel formé contre le jugement a également été rejeté par le cour administrative d’appel de Marseille au motif que la déclaration rectificative relative à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2013, déposée le 18 mars 2016, après l'expiration du délai de déclaration, ne pouvait être regardée comme constituant une réclamation préalable au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales. La réclamation de 2018 était quant à elle, irrecevable en raison de sa tardiveté, en application des dispositions de l'article R.196-1 du LPF.

La société s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat qui lui donne raison en retenant qu'en jugeant que la déclaration rectificative relative à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2013, déposée le 18 mars 2016, après l'expiration du délai de déclaration, ne pouvait être regardée comme constituant une réclamation préalable au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, la cour administrative d'appel a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

L’arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Marseille a été  annulé. Une déclaration rectificative qui tend, par elle-même, à la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions ou au bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire, constitue une réclamation contentieuse préalable lorsqu'elle a été déposée auprès de l'administration fiscale après l'expiration du délai de déclaration.

9. Le sursis de paiement

En principe lorsqu’on conteste une imposition, il faut quand-même payer en attendant l’issue de la contestation. Cependant, selon les dispositions de l’article L 277 du LPF, et contrairement au droit administratif général où les réclamations n’ont en elles-mêmes aucun effet suspensif, en matière fiscale, le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes.

Il est donc possible au contribuable, et c’est ce qui est fortement recommandé, de faire une demande de sursis de paiement dans sa réclamation préalable. Cette demande de sursis aboutit à la suspension de l’exigibilité des impositions en litige, en attendant d’avoir la position de l’administration sur le dossier. C’est très important d’assortir sa réclamation de sursis de paiement afin d’éviter d’éventuelles saisies administratives à tiers détenteur pendant la procédure de contestation. Quand on intervient pour le compte d’un client, il faut, en général, finir sa réclamation en indiquant que « par application de l'article L 277 du LPF, mon client sollicite l'octroi du sursis de paiement des impositions contestées ». Comme le précisent les dispositions de l’article L 277 al. 2 du LPF, l'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent. En effet, le sursis de paiement conserve son effet lorsque la contestation est portée devant le juge de l’impôt, après le rejet total ou partiel de la réclamation par l’administration fiscale, et ce, jusqu’au prononcé de la décision du tribunal.

Le droit au sursis de paiement  s’arrête en principe lorsque le tribunal rend sa décision. Autrement dit, un éventuel appel formé contre le jugement du tribunal n’empêche pas le comptable de retrouver son droit au recouvrement. Toutefois, on peut rappeler les dispositions de l’article L521-1 du Code de justice administrative selon lesquelles quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Il est donc toujours possible au contribuable de demander au juge des référés de la Cour administrative d’appel la suspension de la décision d’imposition. Il est possible au contribuable, même en cassation, d’user de cette faculté. C’est l’article R 821-5 du Code de justice administrative qui lui donne cette faculté en disposant que la formation de jugement peut, à la demande de l'auteur du pourvoi, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle rendue en dernier ressort, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond.

La demande de sursis, lorsqu’elle n’est pas faite dans la réclamation, peut toujours être faite postérieurement. Lorsque le comptable public reçoit la demande de sursis de paiement, il demande au contribuable la présentation d’une garantie. En effet, le sursis de paiement, lorsqu’il est demandé, ne peut être refusé, mais le contribuable doit présenter des garanties.

10. La demande de garanties par le comptable public

Aux termes des dispositions de l’article L 277 al.3 du LPF, lorsque la réclamation porte sur un montant de droits supérieur à celui fixé par décret, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés, et l’article R 277-7 du LPF précise qu’en cas de réclamation relative à l'assiette d'imposition et portant sur un montant de droits supérieur à 4 500 €, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés. Ainsi, dès lors que le litige porte sur une somme en droits, à l’exclusion des pénalités, supérieure à 4 500 €, une garantie est demandée par le comptable public. Lorsque le contribuable ne présente pas spontanément les garanties lors de sa demande de sursis de paiement, le comptable public l’invite à présenter les garanties dans un délai de quinze jours. En effet, selon les dispositions de l’article R*277-1 du LPF, le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l'article L. 277 et le contribuable dispose d'un délai de quinze jours, à compter de la réception de l'invitation formulée par le comptable, pour faire connaître les garanties qu'il s'engage à constituer.

En pratique, le comptable public envoie un courrier imprimé 3740-SD dont l’objet est « constitution de garantie suite au dépôt d’une réclamation ». Ce courrier indique en substance, « vous avez contesté le bien-fondé ou le montant des impositions visées ci-dessous et demandé à surseoir au paiement de la partie contestée de ces impositions, dans les conditions prévues par les articles L 277 et R*277-1 du livre des procédures fiscales ». Il rappelle alors les impositions concernées et précise « conformément aux dispositions de ces articles, vous devez constituer des garanties à hauteur du montant des droits contestés, à savoir (montant des droits, sans les pénalités). Ces garanties peuvent notamment consister en une consignation à un compte d’attente au Trésor, une affectation hypothécaire ou la présentation d’une caution. Je vous serai obligé de bien vouloir, dans les quinze jours suivant la réception de la présente lettre, me faire connaître les garanties que vous proposez de constituer. Je vous précise qu’à défaut de réponse de votre part dans ce délai, je serai dans l’obligation de prendre des mesures conservatoires. Je me tiens à votre dispositions pour tout renseignement complémentaire et vous prie d’agréer, Monsieur ou Madame, l’expression de ma considération distinguée ». Le courrier rappelle ensuite, en général,  les dispositions des articles L 277, R*277-1, R*277-2, R 277-3-1, R 277-4, R 277-5,  R 277-6 et R 277-7 du LPF.

Les imprimés 3740-SD indiquent toujours ces trois types de garanties, mais il faut noter que selon les dispositions de l’article R*277-1 al. 2 du LPF, ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces qui sera effectué à un compte d'attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d'une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans des magasins agréés par l'Etat et faisant l'objet d'un warrant endossé à l'ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires, par des nantissements de fonds de commerce.

En pratique, lorsque le contribuable ne peut présenter aucune des garanties ci-dessus, il est possible de proposer au comptable le versement à son compte d’une certaine somme tous les mois. Quand on est avocat  intervenant pour le compte de son client, on peut alors envoyer au comptable le message suivant : « Je reviens vers vous à propos de  la demande de garantie dans le cadre de la réclamation déposée par (nom et adresse du client). Mon client ne pouvant faire une consignation à un compte d'attente, une affectation hypothécaire ou présenter une caution, il vous propose de faire des virements mensuels d’un montant de (montant proposé) à votre compte. Ces virements interviendront le (date du mois choisi) de chaque mois, et débuteront dès le (date de début des virements).Si vous ne trouvez pas d’inconvénients à ces règlements, je vous prie de bien vouloir me communiquer le RIB du service ».

En général, faute de mieux, plusieurs comptables acceptent une telle proposition. D’autres sont plus réticents. Dans tous les cas, lorsque les garanties proposées par le contribuable sont suffisantes, le comptable a l’obligation de restituer au contribuable, d’éventuels sommes ou biens qu’il a pu appréhender antérieurement à la demande de sursis de paiement. C’est ce qui ressort des dispositions de l’article R277-3-1 du LPF aux termes desquelles, lorsque le redevable fournit des garanties suffisantes, au sens de l'article R. * 277-1, à l'appui d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, celles-ci se substituent aux sommes ou biens appréhendés avant la réclamation pour le recouvrement des créances qui font l'objet de la contestation. Dans ce cas, le comptable restitue les biens ou sommes appréhendés, avant la réclamation pour le montant des créances effectivement garanties.

Lorsque le contribuable ne présente pas de garanties ou lorsque les garanties qu’il a proposées sont jugées insuffisantes par le comptable public, ce dernier notifie sa décision au contribuable par pli recommandé avec demande d'avis de réception postal dans un délai de quarante-cinq jours à compter du dépôt de l'offre, car à défaut de réponse par le comptable dans ce délai, et selon les dispositions de l’article R*277-1  du LPF, les garanties offertes sont réputées acceptées.

En pratique, le comptable public envoie un courrier imprimé 3741-SD dont l’objet est « rejet des garanties proposées suite au dépôt d’une réclamation ». Ce courrier indique en substance, « vous avez contesté le bien-fondé ou le montant des impositions visées ci-dessous et demandé à surseoir au paiement de la partie contestée de ces impositions, dans les conditions prévues par les articles L 277 et R*277-1 du livre des procédures fiscales ». Il rappelle alors les impositions concernées et indique « Par courrier (ou par courriel) en date de (date de la proposition des garanties), vous m’avez proposé la garantie suivante (rappel de la garantie proposée, par exemple, le versement d’une somme de mille euros par mois). Je vous informe qu’il ne m’est pas possible d’accepter cette garantie pour la raison suivante (par exemple, les délai de paiement ne constituent pas une garantie au sens de l’article R 277 du livre des procédures fiscales). Je vous invite à me faire part dans les meilleurs délais, d’une nouvelle proposition. Conformément aux dispositions des articles L 279 et L 279 A du livre des procédures fiscales, vous pouvez contester cette décision devant le juge du référé dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la présente lettre. Je vous précise que cette saisine du juge du référé ne sera recevable qu’à la condition de consigner à ma caisse, à un compte d’attente, une somme égale au dixième des impôts contestés, soit une somme de (il indique le montant correspondant au dixième des droits contestés). Une caution bancaire ou la remise de valeurs mobilières cotées en  bourse peut tenir lieu de consignation. Je me tiens à votre dispositions pour tout renseignement complémentaire et vous prie d’agréer, Monsieur ou Madame, l’expression de ma considération distinguée ». Le courrier rappelle ensuite, en général,  les dispositions des articles L 279 et L 279 A du LPF.

A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le contribuable bénéficie quand-même du sursis de paiement et le comptable ne peut que prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés, conformément aux dispositions de l’article L277 al. 4 du LPF. Il ne peut en revanche pratiquer, par exemple, des saisies administratives à tiers détenteur, pour recouvrer l’impôt, et ce, tant que l’administration n’aura pas pris une décision de rejet total ou partiel de la réclamation ou que le tribunal, le cas échéant, n’aura rendu sa décision.

En cas de dépréciation ou d'insuffisance révélée des garanties que le contribuable aurait présentés, le comptable peut à tout moment, en application de l'article R 277-2 du LPF, lui demander par lettre recommandée avec avis de réception, un complément de garantie pour assurer le recouvrement de la somme contestée.

11. Le contrôle des refus de sursis de paiement

Selon les dispositions de l’article L 279 du LPF, en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque les garanties offertes par le contribuable ont été refusées, celui-ci peut, dans les quinze jours de la réception de la lettre recommandée qui lui a été adressée par le comptable, porter la contestation, par simple demande écrite, devant le juge du référé administratif, qui est un membre du tribunal administratif désigné par le président de ce tribunal. Il s’agit du référé fiscal qui est une procédure d’urgence. En effet, le contribuable peut contester devant le juge administratif, le refus du comptable d’accepter les garanties qu’il  a proposées, mais il doit le faire dans un délai très court, soit dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la décision de refus. Il faut noter que conformément aux dispositions de l’article L279 A du LPF, lorsque la contestation porte sur un impôt qui relève de la compétence du juge judiciaire, le contribuable doit saisir le juge des référés du tribunal judiciaire.

L’article L 279 al. 2 pose cependant une condition de recevabilité. En effet, comme le rappelle le comptable public dans sa lettre de rejet, la demande n'est recevable que si le redevable a consigné auprès de lui, à un compte d'attente, une somme égale au dixième des impôts contestés. Une caution bancaire ou la remise de valeurs mobilières cotées en bourse peut tenir lieu de consignation.

La procédure étant une procédure urgente, le juge des référés, lui-aussi, doit se prononcer, en principe dans un délai d’un mois. Et il lui revient de décider si les garanties proposées répondent ou non aux conditions fixées par la loi. Le juge ne statue donc pas ici sur la légalité de la décision prise par le comptable public et ne se soucie pas d’un éventuel défaut de motivation, car « en application des dispositions précitées de l'article L. 279 du livre des procédures fiscales, il revient au juge du référé fiscal et au tribunal administratif statuant en appel non de statuer sur la légalité de la décision du comptable, mais d'apprécier eux-mêmes si les garanties offertes répondent aux conditions prévues à l'article L. 277; dès lors, en jugeant que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision par laquelle le comptable a refusé la garantie offerte par la société était inopérant, le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit » (Conseil d'Etat, 8 / 9 SSR, du 1 décembre 1999, 184304, mentionné aux tables du recueil Lebon).

L’éventuel appel formé contre la décision du juge des référés est fait dans un délai de huit jours devant le président de la Cour administrative d’appel qui statut, en principe dans un délai d’un mois.

En ce qui concerne les saisies conservatoires, mesures que peut prendre le comptable public en l’absence de garantie proposée ou lorsqu’il estime que les garanties proposées sont insuffisantes, le contribuable peut les contester aussi devant le jugé du référé fiscal. En effet, selon les dispositions de l’article L 277 al. 5 du LPF, lorsque le comptable a fait procéder à une saisie conservatoire, le contribuable peut demander au juge du référé de prononcer la limitation ou l'abandon de cette mesure si elle comporte des conséquences difficilement réparables. La limitation ou l’abandon des mesures est donc conditionnée au fait que ladite mesure comporte des conséquences difficilement réparables pour le contribuable. Dans le cadre de la contestation devant le juge du référé, des mesures conservatoires prises par le comptable public, le délai de quinze jours pour sa saisine n’est pas exigé. Il n’est pas exigé non plus que le contribuable fasse une consignation du dixième des droits contestés.

L’éventuel appel formé contre la décision du juge du référé, en matière de saisie conservatoire, est fait dans un délai de huit jours, non pas comme en matière de la contestation du refus de garantie devant le président de la Cour administrative d’appel ; la juridiction d'appel étant ici, selon la nature de l’impôt en cause, le tribunal administratif ou le tribunal judiciaire, qui rend sa décision dans le délai d’un mois.

Arnaud Soton

Avocat fiscaliste

Professeur de droit fiscal


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